Confort d’été : une proposition de loi pour lutter contre les logements « bouilloires »

Woman Uses Hand Fan and Electric Fan for Heat

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Les canicules successives de l’été 2025 ont rappelé l’urgence de l’adaptation au changement climatique. Parmi les priorités : lutter contre les logements dits « bouilloire », dans lesquels la température intérieure dépasse largement les recommandations de l’OMS. Une proposition de loi, portée par des députés issus de 8 groupes politiques et soutenue par la Fondation pour le logement des défavorisés (ex-Fondation Abbé Pierre) devrait bientôt être débattue à l’Assemblée nationale autour du confort d’été dans les logements.

    Les informations clés

  • En France, 35 % des logements anciens affichent une performance insuffisante sur le critère du confort d’été.
  • Avec la poursuite du réchauffement climatique, cette mauvaise adaptation à la chaleur risque d’amplifier les problèmes sanitaires.
  • La Fondation pour le logement des défavorisés préconise des solutions autres que la climatisation pour améliorer la situation.
  • Un projet de loi transpartisan, porteur de mesures concrètes et axées sur la sobriété, devrait être prochainement discuté au parlement.

Des appartements en surchauffe. Si la question de la précarité énergétique s’est longtemps concentrée sur la saison hivernale, avec des logements mal isolés qui laissent entrer le froid et font exploser la facture énergétique, l’été devient aussi une période critique. L’OMS recommande une température intérieure maximum de 28-30°C le jour et de 26°C la nuit. Ces seuils correspondent à la capacité de récupération du corps humain. Des températures supérieures et répétées nuisent à la santé, avec des risque accrus en cas de pathologies préexistantes.

« Physiologiquement, le corps ne s’adapte pas aux fortes chaleurs, rappelle Maïder Olivier, chargée de plaidoyer climat-logement pour la Fondation pour le logement des défavorisés. C’est donc un enjeu de santé publique. Chaque année, des personnes meurent à cause de la canicule et les fortes chaleurs augmentent le recours au système de santé. Il y a également un enjeu social : les personnes les plus exposées à la chaleur dans leur logement sont aussi les plus défavorisées. Il faut, sans attendre, les adapter aux vagues de chaleur à venir. »



Confort d’été dans les logements : des règles à définir

De premières actions existent déjà. Dans le neuf, la RE2020 impose des exigences élevées en matière de confort d’été. Mais à l’heure actuelle, 80 % des logements de 2050 existent déjà… L’effort doit donc porter sur l’ancien. En ce sens, le DPE comprend un volet consacré au confort d’été, qui indique la capacité du logement à préserver une certaine fraîcheur, même en cas de canicule.

« 35 % des logements affichent une performance « insuffisante » sur cet aspect, constate Maïder Olivier. Il s’agit pour l’essentiel de logements exposés plein sud, non traversants (ce qui empêche de créer des courants d’air), construits avec des matériaux non adaptés et/ou ne disposant pas d’occultant pour se protéger du soleil. Les appartements de petite taille et situés sous les toits des grandes métropoles sont particulièrement concernés. Dans ces « bouilloires », les habitants sont souvent les personnes les plus précaires, notamment des jeunes et des personnes âgées, dans des quartiers populaires. »

Penser sobriété

Quelles solutions apporter ? Selon la Fondation pour le logement des défavorisés, la réponse ne se trouve pas dans la généralisation de la climatisation. « Ces méthodes contribuent au problème, en rejetant à l’extérieur de l’air chaud, ce qui entraîne un cercle vicieux, estime Maïder Olivier.  De plus, la consommation énergétique de ces dispositifs se montre difficilement supportable pour les ménages aux faibles revenus. Nous préconisions donc d’autres solutions. »

Parmi elles, le travail sur les occultations. 40 % des logements français ne disposeraient aujourd’hui pas de dispositifs efficaces, qu’il s’agisse de volet classique ou de persiennes ajourées, qui laissent passer un peu d’air et de lumière, avec une orientation adaptée à la course du soleil. Autre piste : les ventilateurs au plafond, qui diminuent instantanément la température et créent en plus une sensation de fraîcheur. « Les promoteurs immobiliers ont un rôle clé à jouer, dans le neuf comme en rénovation, en adoptant le réflexe des gestes sobres pour le confort d’été, estime Maïder Olivier. Mais les solutions se pensent aussi au-delà du logement ! Par exemple avec la végétalisation des villes et les abords du bâtiment, la peinture en clair des toitures… Nous défendons des solutions sobres en consommation et peu onéreuses, dans une logique de rénovation globale des bâtiments. »

Créer des obligations légales et amplifier les incitations

Cette approche, en phase avec celle du Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC), a fait l’objet d’un travail concerté entre la Fondation pour le logement des défavorisés et des députés, pour aboutir à une proposition de loi. « Aujourd’hui, il n’existe ni incitation ni contrainte pour pousser les propriétaires à agir, déplore Maïder Olivier. Nous recommandons donc par exemple de les obliger à installer des volets aux fenêtres à la demande des locataires. Autre proposition : interdire les coupure d‘électricité pour impayé, même en été. Car cela revient à empêcher les ventilateurs de fonctionner ou d’accéder à de l’eau fraîche du réfrigérateur. » Le texte s’accompagne de mesures incitatives, avec des rallonges budgétaires pour Ma Prime Rénov’ et pour la rénovation du parc social.

La proposition de loi, signée par 152 députés issus de 8 groupes politiques différents, devrait être examinée début décembre par l’Assemblée nationale, lors de la session consacrée aux textes transpartisans, avant d’entamer sa navette parlementaire. « Nous espérons une promulgation courant 2026, conclut Maïder Olivier. Il y a urgence à agir ! Les canicules sont chaque année plus intenses et nous prenons du retard sur la nécessaire adaptation au changement climatique. Investir sur ces questions, c’est investir sur la santé et ne plus mourir de chaud chez soi. »