Comment l’économie sociale et solidaire transforme les quartiers

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Les Halles de la Cartoucherie font partie des six lieux totems de l’économie sociale et solidaire de Toulouse Métropole (©Halles de la Cartoucherie)

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Le 7 novembre 2024, la première édition de la « Kermesse de l’immobilier social et solidaire » (KISS) a été organisée à Paris. Un événement qui révèle le poids grandissant de l’économie sociale et solidaire dans le secteur de la fabrique urbaine. Et pour cause : elle permet plus de cohésion territoriale, de développement économique local et de densification du lien social. Explications.

    Les informations clés

  • Les lieux accueillant des acteurs de l’économie sociale et solidaire favorisent des villes inclusives et résilientes, en contribuant à la revitalisation économique locale, la cohésion territoriale, et la création d’emplois non délocalisables.
  • L’urbanisme transitoire constitue actuellement le mode de collaboration majoritaire entre les acteurs immobiliers et ceux de l’économie sociale et solidaire. Des projets comme Les Grands Voisins à Paris préfigurent la transformation de quartiers entiers.
  • Des projets testent des solutions immobilières pérennes pour déprécariser l’implantation des acteurs de l’économie sociale et solidaire et démultiplier leurs impacts territoriaux. C’est le cas notamment des Halles de la Cartoucherie à Toulouse qui est d’ores et déjà un succès populaire avec 2,5 millions de visiteurs un an après son inauguration.

Tiers-lieux, restauration solidaire, ressourceries et recycleries… Ces lieux totems de l’économie sociale et solidaire (ESS) se développent partout en France depuis plus de dix ans. La raison ? Ils contribuent « à rendre les villes plus humaines, inclusives et résilientes comme » le souligne le petit manuel pour se lancer dans l’immobilier solidaire, un guide pratique réalisé par un groupe de travail dédié de Paris & Co, l’agence d’innovation territoriale de Paris et de la métropole.  

« Les acteurs de l’économie sociale et solidaire, largement ancrés dans leur région (96% d’entre eux sont monorégionaux selon une étude réalisée en 2022 par ESS France et l’Agence nationale de la Cohésion des territoires), offrent des services de proximité qui stimulent le développement économique local et renforcent la cohésion territoriale, observe le groupe de travail. Les initiatives de proximité contribuent par ailleurs à la revitalisation économique des territoires, en relocalisant la production, en créant des filières en circuit court, en développant des activités productives écologiques et en créant des emplois non délocalisables correspondant au niveau de qualification des habitants, notamment des quartiers prioritaires de la ville. »

Autant d’impacts positifs qui amènent les acteurs immobiliers à inclure les initiatives de l’économie sociale et solidaire dans leurs réflexions. À ce jour, l’urbanisme transitoire constitue le mode de collaboration majoritaire entre les acteurs privés de la fabrique urbaine et ceux de l’économie sociale et solidaire rappelle le guide de Paris & Co.

L’urbanisme transitoire, une rampe de lancement pour l’économie sociale et solidaire

En une décennie, l’urbanisme temporaire et transitoire est devenu une composante majeure du paysage urbain en France. « En 2013, se souvient Simon Laisney, président du directoire de Plateau Urbain, nous devions convaincre les propriétaires de notre capacité à commercialiser les espaces que l’on mettait en location, mais aussi et surtout, que l’on rendrait les clés au terme du bail. Dix ans plus tard, ce sont les propriétaires qui viennent nous voir. » Les projets d’urbanisme transitoire menés avec succès par la coopérative lui ont en effet permis de gagner la confiance des propriétaires. Notamment celui des Grands Voisins, porté par l’association Aurore, Yes We Camp et Plateau Urbain, qui a pris place dans l’ancien hôpital Saint-Vincent-de-Paul entre 2015 et 2020 dans le quatorzième arrondissement de Paris.

« Cette expérience aura inspiré Paris & Métropole Aménagement dans ses réflexions pour le futur quartier, qu’il s’agisse de la dynamique participative, de la programmation d’un socle d’activités avec une forte dimension économie sociale et solidaire et un rôle de tremplin immobilier, de la nécessité d’un gestionnaire de quartier, a constaté Jean-François Danon, directeur général de l’aménageur Paris & Métropole Aménagement lors de la table ronde de clôture des Grands Voisins « Comment construire la ville inclusive de demain ? » en octobre 2020. La Lingerie (buvette, salle des fêtes et lieu de vie culturel) finalement conservée, le restaurant Oratoire, la Pouponnière (salle dédiée aux événements) resteront des lieux emblématiques et fédérateurs du nouveau quartier. »

Une pérennisation ô combien importante pour le développement de l’économie sociale et solidaire. « L’occupation temporaire, tout en étant nécessaire, ne constitue pas une fin en soi, souligne le groupe de travail de Paris & Co dans le guide sur l’immobilier solidaire. L’un des enjeux majeurs est d’aboutir à l’identification de solutions immobilières pérennes par ces acteurs de la transition. Cela permettrait de déprécariser l’implantation des acteurs de l’économie sociale et solidaire et de démultiplier leurs impacts territoriaux. » Des projets explorent cette voie depuis plusieurs années, notamment à Toulouse.

Les Halles de la Cartoucherie, le dernier lieu totem de l’économie sociale et solidaire

Imaginées en 2016 et officiellement inaugurées en septembre 2023, les Halles de la Cartoucherie s’insèrent dans l’écoquartier « La Cartoucherie » et font partie des six lieux totems de l’économie sociale et solidaire de Toulouse Métropole. Porté (entre autres) par la foncière responsable ESUS Bellevilles* et réalisé dans des anciens ateliers industriels réhabilités, le projet mêle sur 13 500 mètres carrés une multitude d’îlots. Ces derniers sont pilotés par des structures coopératives : The Roof et l’UCPA pour le sport, Festa pour le pôle alimentation, ou encore Allô Bernard pour la Conciergerie. La société coopérative d’intérêt collectif Cosmopolis coordonne l’ensemble des exploitants du lieu. « Pour accueillir les acteurs aux activités moins lucratives, des loyers différenciés ont été proposés, précise le groupe de travail de Paris & Co. L’activité de restauration génère par conséquent 60% du montant total des loyers collectés, lorsqu’elle occupe 30% de la surface totale du site. » Un ratio qui doit permettre de maintenir le modèle d’exploitation à l’équilibre.

 « La partie restauration et commerces de bouche prend une bonne partie du projet, et on a bien conscience que le public se déplace en masse avant tout pour cela, témoigne Landry Olivier, directeur général du collectif Cosmopolis, dans les colonnes d’Actu.fr un an après l’inauguration. Mais par ce biais, le public peut aussi découvrir toutes les autres offres qu’on propose à l’intérieur des Halles. Il y a tout un tas d’activités qui tournent autour de la culture, du sport, du champ social, de l’enseignement ou des entreprises… Et il y a des communautés qui commencent à s’approprier l’établissement pour y faire leurs propres activités, à l’intérieur du bâtiment. Intégrer les habitants du quartier, c’est très important pour nous. »

Premiers résultats : 2,5 millions de visiteurs ont été recensées dans les Halles de la Cartoucherie entre septembre 2023 et septembre 2024. Quant à l’équilibre économique, il est visé pour 2026. « « Les investissements ont été très importants pour lancer l’exploitation du lieu, révèle Landry Olivier. On essaie de réduire nos charges sans pour autant pressuriser les prestataires avec lesquels on travaille. Notre objectif, c’est de s’améliorer partout sur l’exercice à venir. » Et ainsi detracer une voie viable pour la transformation d’un quartier grâce à l’économie sociale et solidaire. 

* Bellevilles a contribué aux travaux du groupe de travail de Paris & Co sur l’immobilier solidaire.  

VINCI Immobilier ou l’approche fine de la ville équilibrée
Virginie Leroy, le promoteur ensemblier partenaire, citoyen et créatif VINCI Immobilier compte s’appuyer sur sa connaissance des tissus associatif locaux afin de proposer des locaux adaptés aux besoins des acteurs du secteur de l’économie sociale et solidaire. Avec un parti-pris : les installer de manière pérenne dans les quartiers de vie aux côtés d’activités de l’économie « traditionnelle » tels que des hôtels, des espaces de bureaux, des restaurants, des crèches… Équilibre, mixité et dynamisme du quartier prendront ainsi tout leur sens au bénéfice de chacun.